Comme les autres secteurs de l’économie, la santé bénéficie de la place toujours plus importante que prennent les technologies de l’information et la convergence numérique. Des mutations qui transforment le fonctionnement de l’univers médical et contribuent au développement de la recherche thérapeutique.
Il ne faut pas, pour autant, nier les échecs auxquels ces nouveaux outils ont donné lieu. Rappelons les problèmes initialement rencontrés en France lors des débuts de la Carte Vitale et les surcoûts et retards dans la mise en œuvre d’un dossier médical informatisé réellement utilisable, ou les multiples difficultés informatiques auxquels le National Health Service (NHS) britannique a dû faire face ces dernières années.
De même, la fermeture de Google Health en 2011 ou plus récemment, avec l’avortement, en juillet 2013 de la filiale de santé sur mobile de l’opérateur mobile Telefonica O2UK au Royaume-Uni, montrent combien les applications de télésanté doivent, pour réussir, offrir un véritable service à valeur ajoutée reconnue par l’utilisateur et s’appuyer sur la fiabilité de certains capteurs ou encore la permanence de connexion et d’accès aux réseaux. Toutefois, Google a lancé un nouveau projet, avec… Apple. Les deux géants travaillent main dans la main sur le sujet de la santé et au vieillissement et ont annoncé la création de Calico, une entreprise pour lutter contre « la maladie et le vieillissement ». Elle sera dirigée par Arthur Levinson, le président du conseil d’administration d’Apple et de la société de biotechnologies Genentech. D’autres grands groupes de nouvelles technologies, comme IBM et Oracle, ont déjà investi sur ces problématiques, ce qui révèle l’ampleur des enjeux.
D’autant qu’une fois les difficultés dépassées, les bénéfices sont gigantesques. Tout d’abord, les patients deviennent plus actifs et mieux informés de leurs soins, en même temps que l’ensemble de l’écosystème évolue vers des coopérations accrues entre les différents acteurs impliqués (personnels médicaux et paramédicaux publics et privés, laboratoires pharmaceutiques, opérateurs de télécoms, sociétés de technologie, autorités publiques locales et nationales, compagnies d’assurance…). Par ailleurs, les multiples expérimentations menées depuis quelques années, tant dans les pays développés qu’émergents, ont démontré que les technologies mobiles fournissent d’énormes capacités de contrôle, d’individualisation, de flexibilité, de sécurité et permettent une plus grande autonomie pour les patients. La qualité de vie de ces derniers est ainsi améliorée, surtout lorsqu’ils sont atteints de maladies chroniques, d’autant qu’on peut désormais mieux anticiper les risques grâce à des outils de diagnostics très fins.
Enfin, ces progrès autorisent une meilleure efficacité organisationnelle grâce au partage des données médicales pour les professionnels de santé.
Ces nouvelles technologies s’appliquent à tous les stades du parcours de soins. Lors du traitement en face à face, il est désormais possible de mobiliser à distance des équipes pluridisciplinaires. Une fois le traitement amorcé, on peut opérer un contrôle à distance, grâce à des capteurs qui permettent d’évaluer la réaction du patient à tel ou tel traitement, et de déclencher une alarme en cas de problème. Par ailleurs, les technologies mobiles et « wireless » sont de plus en plus souvent intégrées dans les équipements médicaux portables. Citons les pompes à insuline permanentes, implantées chez les diabétiques. Le développement d’équipements et d’accessoires dits « wearable » (comme par exemple les fameuses lunettes Google, les montres communicantes, voire les technologies mobiles directement implantés dans les vêtements incluant les tissus conducteurs) offrent de belles perspectives.
En parallèle, la télésanté continue à se développer, et permet aussi bien d’établir un diagnostic que d’assurer le suivi d’un patient. Ainsi, ils peuvent être conseillées en temps réel sur des gestes médicaux.
Enfin, les solutions mobiles de prévention et de bien-être se multiplient. Contrôle de l’état physique, services de soutien à la gestion de maladies chroniques, soins aux enfants et aux personnes âgées ou dépendantes, suivi des addictions… , elles sont l’objet d’un marché en forte croissance. De nombreuses applications mobiles donnent accès à des informations sur les maladies et les services interactifs à distance. Les services de m-santé (santé mobile) vont de l’accès à l’information médicale dans des régions difficiles d’accès, au contrôle épidémiologique, en passant par le suivi, la réduction des risques et même le diagnostic.
Le marché de services et produits de santé utilisant les technologies mobiles ne constitue pas seulement une source potentiellement importante d’économies et de rationalisation pour les états, mais également un marché potentiellement lucratif (tant pour les acteurs publics que privés). Opérateurs mobiles, assurances, prestataires privés de services de santé… sont sur les rangs car ce marché devrait croître de plus de 520% entre 2013 et 2017 selon le cabinet Price Waterhouse Consulting. Cet essor est largement soutenu par le gouvernement, qui a publié, en février dernier, une feuille de route, laquelle prévoit l’utilisation des technologies numériques dans le domaine de la santé. Il s’agit, notamment, de lutter contre les inégalités et de mieux informer les patients. A ce titre, deux projets sont considérés comme prioritaires. Tout d’abord, « L’hôpital numérique » est un plan à cinq ans qui doit améliorer, grâce aux systèmes d’information, la coordination, la qualité et la sécurité des soins. Ensuite, le projet « Territoire de soins numériques », auquel 80 M€ seront consacrés dans le cadre des investissements d’avenir, permettra de partager et d’échanger l’information pour permettre une prise en charge coordonnée des patients tout au long de la chaîne de soins. Y compris à l’extérieur des établissements de santé.
De l’hôpital virtuel à la coordination des équipes de secours, du partage de données à la formation des personnels médicaux, les technologies mobiles ont d’ores et déjà un impact important tant auprès des professionnels que des patients. Des économies de coûts espérées pourraient provenir de ces opportunités…