Le 31 mai dernier, en ouverture de la 17ème conférence annuelle des Echos « Mutations des industries pharmaceutiques, quels nouveaux modèles économiques ? » Philippe Lamoureux s’est exprimé au nom du Leem pour faire un point sur les enjeux des entreprises pharmaceutiques et les engagements que les politiques doivent mettre en œuvre à l’heure où « la compétitivité de l’industrie française est plus que jamais indispensable à la croissance économique.»
Un contexte difficile
L’industrie pharmaceutique fait face à une mutation scientifique et géopolitique…
Selon Philippe Lamoureux, « la production chimique traditionnelle est lourdement concurrencée par une production de spécialités génériques souvent localisée à l’étranger et à un développement des biotechnologies, caractérisé par de nouvelles méthodes de recherche et développement et des procédés de production sophistiqués, longs et couteux. »
Pour le directeur général du Leem, « l’innovation change de nature en passant de la recherche de blockbusters au développement de produits de niches. » En effet« Les grands pays du médicament se voient de plus en plus concurrencés par des grands pays émergents. Les structures classiques des entreprises éclatent : elles passent d’une organisation intégrée, hiérarchisée, assise sur une base territoriale nationale à une organisation calée sur le marché, structurée en business units, par aires thérapeutiques et grandes zones territoriales. »
Les entreprises du médicament doivent aujourd’hui « diversifier leur activité en intégrant les biotechnologies, en réorganisant fondamentalement leur R&D, en faisant appel à la sous-traitance, en développant des partenariats public-privé »…
À une crise de confiance et des réductions budgétaires
« Au total, la ponction opérée avoisine les 2 milliards d’euros, plaçant ainsi pour la première fois, le marché français en situation d’involution. » Philippe Lamoureux interroge sur la façon de rester attractif au plan mondial alors que ces politiques de court terme sont lourdes en conséquences industrielles avec par exemple la destruction du tissu productif (exemple britannique) et sanitaires (accès aux soins et à l’innovation pour les patients : exemple grec).
De plus, selon le directeur général du Leem, « le climat de suspicion suivant l’affaire du Médiator a entrainé la diminution sensible du nombre d’essais cliniques réalisés en France ou encore celle du nombre de dossiers d’AMM dont la France est pays rapporteur. »
Dans ce contexte le Leem détermine 3 impératifs :
- Réaffirmer l’importance stratégique de la filière
« Nous attendons du nouveau gouvernement qu’il adresse au monde industriel des signaux clairs sur sa volonté de rétablir – ou pas – des conditions de lisibilité, de visibilité et de prédictibilité dans ses relations avec les industriels. » a indiqué Philippe Lamoureux.
« Il importe que, dans les mois qui viennent, les grands rendez-vous qui structurent le dialogue Etat-Industrie puissent être honorés, selon des modalités qu’il appartient aux autorités de fixer. » Car « les équipes de recherche publiques françaises et les grandes directions de R&D des industriels internationaux comptent beaucoup sur des manifestations susceptibles de les réunir autour d’objectifs stratégiques, sous la houlette des plus hautes autorités de l’Etat, sur le modèle par exemple des Rencontres internationales de recherche (RIR) …»
- Renforcer la politique conventionnelle
« La réaffirmation du rôle central de la politique conventionnelle comme outil de maîtrise des dépenses constituerait également une garantie pour les entreprises du médicament, étant entendu que le niveau de régulation 2013 sera un indicateur majeur des intentions du nouveau gouvernement pour l’avenir. » a ajouté Philippe Lamoureux.
- Déployer la loi Médicament
Le directeur général du Leem a affirmé l’importance de la clarification de la loi Médicament : « Nous attendons des pouvoirs publics qu’ils éclaircissent sans tarder les zones d’ombre et les malfaçons du texte (par exemple sur les sujets comme celui des dons aux associations de professionnels de santé). Il y a urgence à engager un véritable dialogue avec les industriels, mais également avec les professionnels de santé, sur la mise en œuvre de la transparence des liens, à laquelle notre secteur est attaché, en prenant garde à se conformer au droit européen et aux dispositions de la Loi informatique et liberté et enfin, en tenant compte des problèmes épineux de mise en œuvre pratique. »
« Je crois également qu’il serait bon de renouer les fils du dialogue avec les patients et leurs représentants sur certaines dispositions d’application de la Loi sans doute trop vite passées sous silence afin de veiller à ce que le nouveau cadre juridique ne remette pas en question l’accès à l’innovation. »
Philippe Lamoureux a conclu son intervention par une interpellation directe des politiques : « On a beaucoup parlé, durant cette campagne présidentielle, des moyens de réindustrialiser le pays. Je voudrais dire aux politiques aujourd’hui en responsabilité qu’il est infiniment plus facile de ne pas désindustrialiser un pays, que de devoir le réindustrialiser. »
Pour en savoir plus :
Conférence des Echos 2012 : Mot d’introduction de Philippe Lamoureux, directeur général du Leem
Crédit photo : Leem